Le Diktat est mort, vive le Diktat

Erikea tout entière étant en deuil. Le 14e Diktat des États-Unis d'Erikea, Barack Eisenhower, recevait aujourd'hui ses dernières funérailles. La totalité de la haute société erikeanne et l'État-major de l'Armée était rassemblé à cette occasion au Mausolée Diktatorial, une immense tour en verre qui abritait, à chacune de ses étages, le corps d'un Diktat. Situé en plein coeur de Medul City, ce monument resplendissait par sa simplicité extérieur. En fait, le Mausolée était un vaste musée, qui pour l'instant, s'étendait sur quinze étages, les 85 étages supérieures étant vides actuellement. Sur chaque étage était entreposé une capsule cryogénique transparente dans laquelle on avait congelé la dépouille du défunt. Sur son étage, on avait fait une collection des objets du défunt, des hologrammes sur les moments marquants de sa Diktature, bref, c'était une véritable biogrpahie matérielle qui lui était dédié. Le monument disposait d'une garde personnelle de droids Hells-3, chargé d'assurer la sécurité du complexe et de le protéger contre le vol.

Aujourd'hui, toute l'élite de la société était rassemblé dans le vaste Hall du Mausolée Funéraire puisque l'usage interdisait, lors du décès d'un Diktat, de pénétrer dans la Tour tant que l'étage funéraire n'aurait pas été aménagé convenablement, l'arrangement étant supervisé par la famille du défunt. Aussi, les funérailles avaient toujours lieu dans le Hall. En tant que nouvelle Diktat, c'était Élizabeth qui ferait l'oraison funèbre, et par le fait même de la tradition, son discours inaugural. Pour une fois, elle avait délaissée ces robes blanches pour une robe qui contrastait avec la personne qui la portait, la faisant paraitre plus âgée qu'elle ne l'était réellement

-Aujourd'hui est mort un grand homme. Pour moi, c'était un père, pour vous un Diktat, pour le reste de l'Humanité, un tyran peut-être. Néanmoins, au-delà des étiquettes que l'on pouvait lui assigner, Barack Eisenhower mon père a été un grand homme qui a fait des erreurs mais qui n'a jamais hésité à reconnaitre ses torts. Il ne s'est jamais prétendu comme étant parfait et n'a jamais cherché à réfuter les actes qu'il avait commis tout au long de sa vie. Au contraire, à la fin de sa vie, il a cherché à donner une vision à Erikea, à lui donner des moyens de s'intégrer, non plus par la force, mais par la concertation dans la société internationale. En acceptant de reconnaitre ses torts et de prendre sur lui les erreurs d'Erikea par le passé, il a amené une ère nouvelle dont il faut à présent profiter. Mon père a été l'exemple même du Diktat qui a lutté toute sa vie pour la sécurité et pour le bien-être d'Erikea et pour cela, je l'en remercie au nom de tous les Erikeans et Erikeannes. Il a donné le début d'une vision à long terme pour Erikea, vision qui se concrétisera sous ma Diktature. En acceptant de signer le traité de Seran, mon père avait conscience d'ouvrir une nouvelle ère pour le Pacte de Seran-Valen; en mourant, il avait conscience qu'on tournerait une page sur notre passé afin d'amorcer l'avenir sur de nouveaux principes.

Mes amis, pendant 400 ans, nous avons vécu dans une Diktature autocratique qui ne caractérise pas nos origines. Certes, nous avons craint le retour de la démocratie instable qui a failli provoquer l'éradication d'Erikea. Mais, aujourd'hui, cette Diktature doit reconnaitre ses torts, à savoir qu'elle ne peut espérer gouverner un monde de 12 milliards de personnes. Pour en assurer le développement, il faut l'intervention de nouveaux acteurs dans l'État. Vous me connaissez, et je n'ai jamais caché mes opinions politiques, je suis pour l'établissement d'un nouveau pouvoir, d'une nouvelle Constitution basée sur le modèle spartiate, sur le modèle qu'Enrico Moredino avait voulu établir avant de mourir. Son décès, et l'état désastreux d'Erikea, à l'époque, ont empêché une telle constitution de voir le jour. Mais aujourd'hui, la Diktature totale des États-Unis d'Erikea doit prendre fin et le pouvoir doit se redistribuer afin de représenter davantage la société erikeanne. Nous poursuivrons également nos politiques de coopérations avec les mondes du Pacte. Déja, la coopération économique s'accroit entre nos divers mondes et tissent des liens qui ne peuvent être que profitables à nos Technocrates, à nos ouvriers, bref à Erikea tout entière. Tout ceci, c'est l'héritage de mon père, c'est l'héritage de tous les Diktats qui m'ont précédé à ce poste. Et je compte, avec votre appui, leur faire honneur en faisant en sorte que cette héritage se fructifie sous ma Diktature afin que les prochaines générations puissent bénéficier d'une Erikea, non pas seulement forte, mais prospère. La paix est le fruit de 400 ans de durs labeurs militaires et il est enfin temps que nous y goûtions. Père, je vous souhaite de contempler avec fierté, aux côtés de vos prédecesseurs, la marche historique et continuelle dans laquelle s'est engagée Erikea. J'espère que vous guiderez mes actions comme vos prédecesseurs ont guidé les vôtres. (Elizabeth termina par la formule d'usage, héritée des anciens États-Unis d'Amérique) Que Dieu bénisse Erikea

Suite à cela, on organisa une magnifique soirée pour commémorer l'arrivée du nouveau Diktat. Malgré tout, la nouvelle Diktat se dit qu'elle aurait tout donné pour avoir son époux auprès d'elle, chose qui n'allait être que plus difficile aux vues de leurs obligations respectives

La situation internationale actuelle faisait, par la force des choses, qu'aucun Apien ne se présenta à la réunion. Silence radio de ce coté là. Néanmoins, plusieurs membres du RSDA saluèrent le discours de cloture de la nouvelle diktatrice, qui proposerait peut-être un régime un peu moins inégalitaire à son peuple et plusieurs voix envisagèrent ainsi de suspendre le Blocus au sein du conseil des Sages.

En revanche, le Journal Aepophis Ben'Talaan diffusa un article incendiaire à l'égard de Barrack Eisenhower (le dernier d'une longue série, faut-il le rappeler) remettant ainsi sur la table les plus graves "erreurs" (que le journal qualifiait d'actes hautements tyranniques, sanguinaires et cruels), comme le Bombardement aux armes chimiques d'Eryn City, la destruction du monastère de l'ordre des épéistes Seraniens, aux bibliothèques immensément riches de connaissances, la nommination du Tyran Venator à la direction de Seranon, et sa participation dans la terrible guerre civile de Seranon (et pas toujours avec des méthodes louables), affaire d'ingérence diplomatique hautement condamnable, enfin, dernier d'une longue série, la journaliste Ni'Saan Buriel Asand'Aqual rappela la légalisation de l'esclavage sur Erikea, acte encore plus condamnable car considérant les Carcars pour des sous-hommes.

Sur la diktatrice, il ne fut fait état que d'un bref résumé de sa vie, et d'un compte rendu du discours (obtenu par le biais des dépèches internationales. Aucun journaliste Apien n'était assez fou pour s'aventurer sur Erikea). La biographie était d'ailleurs pimentée de petites piques concernant "le mode de succession, pour le moins étrange, des dirigeants Erikeans" signalant au passage que "Mme Eisenhower était sans doute l'une des rares diktatrice qui n'ai pas vu sa carrière éclaboussée dés le départ par l'assassinat de son prédécésseur ...".

L'article se terminait alors par une question aigue "Peut-on pardonner à un être doué d'intelligence, quel qu'il soit, une vie entière de meurtres, de massacres et de barbarisme au titre de cinq années d'une politique plus "douce" ?" ...

Et évidement, il était clair que cet article ferrait un tabac sur Apel, et que l'Aepophis Ben Talaan le tirerait à plusieurs milliards d'exemplaires ...

A signaler également, la parution d'autres dossiers sur Erikea à cette occasion dans de nombreuses autres compagnies de Presse Apiennes ... sans doute moins grinçants ...

La Diktat écouta l'Impératrice avant de lui répondre:

-Les plus conservateurs des Erikeans se rangeront à mon avis à cause du paradoxe dont ils sont les victimes. Ils sont tous en faveur du pouvoir diktatorial donc, la critique de mes décisions les amène à se mettre en contradiction. Dans le même temps, mes soutiens sont dans chez les Centristes et les Réformistes, donc chez ceux qui sont profitables à un changement de la Constitution. Il apparait que les Conservateurs ne pourront rien, surtout que la Constitution, qui est déja rédigée, garde un fort pouvoir pour le Diktat. C'était le plus grand projet de mon père, mais il l'a toujours repoussé dû aux contraintes que cela soulevait en temps de guerre et d'incertitude.

Suite à cela, la Diktat accueillit les condoléances des ambassadeurs unionniens et krypto-arkiliens, échangeant quelques amabilités avec eux. Le lendemain vint, sur CNN-Erikea, la réponse aux critiques apio-jadéennes. Cette fois, la Diktat parlait depuis son bureau au sommet de la Tour Eisenhower, entouré des anciens conseillers de son père

-Erikeans, Erikeannes, aujourd'hui s'ouvre une nouvelle ère pour Erikea. Une ère de cohabitation et d'ouverture envers d'autres nations. Pourtant, alors même qu'Erikea a le regard tourné vers l'avenir et vers l'intégration, certains ont le regard tourné vers le passé et vers la division. À force de porter un jugement accusateur, ces quelques individus en sont venus à devenir ceux qu'ils abhorraient. Alors qu'Erikea tente ses premiers pas vers une ouverture difficile et hésitante, ces nations tentent de l'étouffer, de la discréditer aux yeux des quelques nations alliées et amies d'Erikea. Mais plus grave encore, parallèlement à cette ouverture erikeanne entamée par mon père, d'autres nations s'enfoncent dans un bellicisme condamnable au point de devenir ceux qu'ils critiquaient. À l'heure actuelle, ils instaurent des blocus, font des diffamations, insultent la mémoire d'un Chef d'État qui vient juste de décéder. Libres à eux de procéder ainsi. Libre à ceux qui veulent vivre dans l'ombre du passé d'y rester. Erikea a trop à faire pour perdre son temps en de vaines altercations à savoir si le Diktat Eisenhower fut ou non une bonne personne sur le plan moral. Pour Erikea, le Diktat Eisenhower a pris les décisions qui s'imposaient dans un contexte de guerre, de déstabilisation dans la région et de préservation des intérêts erikeans. Désormais, Erikea laisse ses morts reposés en paix et se tourne, toujours aussi confiante en elle-même mais également confiante dans ses alliés sur lesquels elle sait qu'elle peut compter, vers un avenir qu'elle veut radieux. Je terminerai en disant que tous les grands hommes furent critiqués par leurs contemporains; et pourtant, c'est à travers leurs critiques que leur mémoire a perdurés à travers les siècles. Souvenez vous de César....Souvenez vous de Napoléon Bonaparte...Souvenez vous du Diktat Barack Eisenhower