SCW Palace: Casino de Hegemony

-Amiral, s'exclama le Comte, cela fait longtemps que nous n'avons pas eu le plaisir et l'honneur de vous voir. L'Union bénficierait-elle de l'activité divine ?

-Pourtant nous les bourgades comme Tiléa sont très actives. Il serait peut-être temps d'y investir !

Mais qu'ils arrêtent de me regarder comme ça... On dirait qu'ils n'ont jamais vu un homme, un vrai, ces pètes-secs... Ho, j'ai deux mains deux bras ! Qu'est ce qu'il y a Toto ? Ah, une coupe de... Ouais, balance, ouais. Bon, pas avec ça que je vais me foutre la mine du siècle... Enfin, on est là pour le boulot. Il parait. Tiens, déjà fini, ce machin ? Bon. Non, on ne la jette pas derrière soi !

Comment je me suis retrouvé ici, moi... Ah oui, voila ! Je me souviens : une certaine jeune pilote -enfin jeune... héhé, je vais lui rappeler ça...- m'avait convaincu de faire un peu de pub autour de moi... A un lieu où de bons payeurs se donnaient rendez-vous. Et j'avais naturellement décidé de l'emmerder. Donc, pas de smoking, de tenues de soirées... Ces grands seigneurs peuvent m'observer dans mon plus simple appareil. Non, pas ça, espèce de taré ! Avec mon habituel gilet de cuir brun, bras nu, mon infame treillis... Si avec ça, j'arrivais à avoir UN contrat, c'était bien le diable. Et elle aurait l'air fine, la Schärner... Moi, mesquin ? Si peu.

Un petit groupe attire mon attention. Jolies, les gamines. Et celui au milieu ne démérite pas, dans un sens. Si j'étais une jeune femme, j'aurai été très heureuse de le percuter. Bordel, la prochaine fois, je regarde devant moi ! Le vieux réflexe : je bondis en arrière, position de garde, il vaut mieux l'oublier. En tout cas, le gars qui vient de voir ses jetons partir en live sur le sol -et les rejoins- risque de ne pas l'oublier. Non, je n'aurai pas du me pencher pour l'aider : qui eut cru que cette table était si fragile ? Pas moi. Non, je n'aurai pas du m'appuyer dessus. Un morceau de tapis vert en main... J'ai l'air fin, moi maintenant... Toto, amène la suite, je sens que je vais accélérer la murge pour éviter les balles du ridicule...

Et deux clients, deux. Charybde exulte intérieurement, savourant le plaisir de cette situation pour le moins plaisante.
A son bras, un homme charmant, promis à d'importantes fonctions militaires, ou politiques, ou les deux, allez savoir. Peu importe en vérité.
A l'autre bras du client numéro un, client numéro deux - cliente, en fait. La jeune épouse, fraîchement mariée, jalouse comme un pou mais ouverte d'esprit. Magnifique, d'ailleurs, la jeune catin s'en pourlècherait les babines. L'homme ne dépare pas non plus, viril et impeccable de classe. Un couple charmant, le troisième de sa vie. Elle a déjà passé une soirée fort intéressante avec eux, d'où sa présence au Casino en leur compagnie. Charybde adore multiplier les expériences inédites, acquérir un maximum de connaissance dans son domaine est fortement recommandé si on veut se faire... recommander justement!

Elle même a revêtu ses plus beaux atours pour l'occasion: une robe tout en voiles et rubans de satin, d'un mauve délicat faisant ressortir celui, intense, de ses yeux; elle a relevé sa chevelure en un chignon dégoulinant dans son dos nu, laissant largement voir ses ailes d'ange et la chute de ses reins. Un décolleté vertigineux accroche tout regard sur la naissance de sa gorge ronde, et un pendantif va habilement se perdre entre les seins.
Des boucles scintillantes à ses oreilles, des bracelets reflétant chaque rai de lumière, elle est éblouissante. Et ses hauts talons ne sont pas de trop pour être à la hauteur - au sens littéral - des deux autres. Par contre, quelle saleté ces tapis! Ca accroche...

Son attention est détournée par un brouhaha sur leur droite: un individu grossièrement attifé est en train d'agresser un honnête client du Casino!
- Ah oui, le Casino... Fantasme réalisé d'y mettre les pieds, et en telle compagnie, Charybde en a presque les larmes aux yeux... ou ailleurs. -
Les yeux de la belle s'agrandissent de surprise: comment un tel rustre a pu être autorisé à entrer ici ? Et que fait la police, la garde, l'armée ? Quelqu'un, enfin! Elle se tourne vers Aruns, presse un peu plus son corps sur son bras - fichtrement musclé, hum- et déclare, l'air effrayé:

"Vous avez vu ça ? Il faudrait faire quelque chose, non ? "

Bon, elle joue un peu les demoiselles effarouchées, c'est normal. Ca les surprend d'autant plus de la voir après. Bref.

Bon. On se calme. Et en premier lieu, on regarde plus précisément QUI on a bien pu cogner. L'homme ? Ou l'une des deux charmantes donzelles ? Cligne les yeux. Voila que le grand seigneur te tend une main. Je ne m'en prive pas, tant qu'il ne cherche pas à me l'écraser en plein dans la goule... Massage de machoires de rigueur, un geste de vague excuse vers le second homme au sol. Une minute ? C'est bien ce blanc-bec qui vient de me relever comme si j'étais une fillette ?

Tomas Hart... Freelance.

Tu veux pas que je te donne ma carte en plus ? Dix pour cent sur toute la came que tu me demanderas de transporter dans l'univers... Sisi, et profite de ma promo "amis du SGC" du Week-End, tu vas l'aimer, je suis sur, avec tes deux poules... bordel, on se retient, tu n'es pas en terrain ami, et le couteau que tu as réussi à planquer sous ton fut' ne va pas t'aider.

Désolé... De vous être rentré dedans...

Et de t'avoir refait ta p'tite gueule, don juan... Ah non, ça j'aurai adoré...

Je peux...

Allez, Hart, force toi...

C'est... Ma tournée. Pour me faire pardonner, comme on dit... Héhé...

Une petite clope sort. Avec le pognon que ça va te couter, faut te calmer, vieux, et fissa !

Oups. On récapitule: l'ordonnance du Légat a intercepté le gêneur, et c'est elle qui l'a projeté sur l'autre malheureux. Les gestes précis de la militaire ont été si rapides, que Charybde a à peine pu les voir.
Clignant un peu des yeux, elle observe la suite des événements, entend le chuchotement d'Aruns en latin et se détend un peu. Ces deux-là sont les meilleurs gardes du corps dont elle aurait pu rêver!
Un coup d'oeil curieux au goujat. Beurk, on dirait un de ces soldats de bas étage qui sillonnaient Vimerii à l'époque..
Frisson de dégoût, moue plissée pour le confirmer. Charybde se rapproche d'Elysia, prend instinctivement sa main pour chuchoter, toujours en latin:

"Qu'est-ce que c'est que ça ? Une menace, vous croyez ?"

Autant se renseigner tout de suite. Pas pensé à prendre une arme, mince... La bonne blague. L'arme de toute catin qu ise respecte, c'est son bagout, et son corps est son armure.
La brunette reporte son regard indigo sur les deux hommes, intriguée par leur échange. Une tournée ? Des étincelles de convoitise font aussitôt pétiller ses prunelles, et elle serre machinalement la main gantée dans la sienne nue. Un verre gratuit, ça a le don de lui donner le sourire....

Gnihi, merchi d'acchepter mon offre, moncheigneur... On desserre la machoire, Hart. C'est toi qui l'a voulu dans un sens. Inconsciemment, mais tu l'as voulu. Et si ton inconscient casquait ? Il a pas sa carte bleu, c'est bête hein ? Je lui ferai un reçu.

Bon, revoilà mon bon pote Toto.

Hart : Trois Forvish mon gars. Bien fraîches.

Ou c'est moi qui te refroidit, suis pas d'humeur. J'avoue que la boisson m'a surpris. Je me serai attendu à un de ces imbéciles de la haute qui picolent du jus de fruits en gloussant et en se moquant du bas-peuple. Peut-être moins bête qu'il n'en a l'air, le gringalet. On retourne son sourire aussi forcé que l'accouchement d'un vandsien vers "l'hôte".

Hart : Et... Pour votre autre amie ? Stupide... méprise, oui. J'ai jamais aimé les joueurs, alors mes réflexes me jouent des tours.

J'ai jamais aimé les officiards de ton genre, fais gaffe que mes réflexes ne te jouent pas des tours... Non, Tom, si par miracle tu arrives à sortir ton arme, tu auras les services de sécu' qui vont te tomber dessus. Et pire encore... Romy va te tuer à ton retour. Un frisson rien qu'à cette pensée. J'aurai du emmener les russes avec moi. Ah non, ils auraient becqueté les jetons...

De la bière Forvish, beurk! Charybde réprima une nouvelle moue dégoûtée pour ne pas faire mauvaise impression, réfléchit à toute allure tout en composant un sourire forcé sur son joli minois et répondit en galactique:

"Pour moi, ce sera un cocktail au rhum Bavannais, merci."

Et tant pis si ça fait prétentieux. Tant mieux, même. La brunette regardait ledit Hart, hésitant à le cataloguer dans les "rustres sans intérêt" ou "danger potentiellement utilisable". La tenue n'encourageait guère, pas plus que le langage mâchonné, mais la catin avait appris à ne pas se fier aux apparences, aussi réservait-elle encore son jugement.

Servie par un pingouin en costume, Charybde sirota son verre avant de répondre à Aruns -hum, ce goût sucré ravissait ses papilles de petite fille. Péché mignon!

"Eh bien, comme vous je suppose.... Jouer un peu, boire, et pourquoi pas faire des rencontres intéressantes ?"

Petit clin d'oeil coquin, rappel de leur dernière nuit ensemble. Qui sait s'ils ne se trouveraient pas un quatrième camarade de jeu, ici ? Après tout, il n'y avait pas que des soldats dégénérés... Tiens, d'ailleurs, il fichait quoi, debout comme un plantin, l'autre ? La catin s'adressa à lui d'un ton plus rêche, adouci par sa voix cassée:

"Et vous, le freelance, asseyez-vous donc. Qu'est-ce qui vous amène en ces lieux ?"

Sous-entendu, qu'est-ce qu'un gros machin mal fagoté comme lui foutait ici... Grosso modo.

Tiens, voila que mossieurs me laisse une place. Doit déjà être saoul le bonhomme. Ou chercher à s'encanailler devant ses poules. Viens me voir sur mon terrain, tu verras ce que c'est, un homme, héhé.

Une gorgée de ma bière. Je peux peut-être rester à faire le plantin ici, maintenant, s'ils décident de me laisser tranquille. Ce serait bien. Plus de minauderies, plus de tournées, plus de... Tiens, Toto qui demande à... Chier. Je pose une petite liasse -trop grande- sur le comptoir, qu'il embarque sans me rendre la monnaie. Toi, à la fin de ton service, tu vas en chier.

Tiens non, impossible de rester tranquille, v'là t'y pas la poule de luxe qui décide de se mêler de mes affaires... Bon. Elle ne va pas le regretter... Elle me parait déjà antipathique celle-là, encore plus que l'officier.

Hart : Je ne viens pas ici pour jouer, milady, je n'ai pas d'argent à perdre dedans. Tout le monde n'est pas doté de la même fortune, n'est ce pas ? Je crois que je viens pour principalement détrousser les clients, les jeter au sol, en bref me comporter en rustre. Mais vous l'avez déjà deviné hein ? Désolé si je vous ai cassé un ongle, c'était pas volontaire.

Une autre gorgée.

Hart : Plus sérieusement, un casino, c'est de l'argent. L'argent, c'est le banquier. Et le banquier, c'est le client. Je suis là pour le boulot. Ou plutôt le chercher.

Encore une... Merde, déjà vide ? Toto, tu m'en remets un. Non, je ne rajouterai rien, tu as de quoi me payer cinq-six verres avec ce que je t'ai filé !

A mesure que Hart parlait, Charybde sentait l'irritation la gagner. Si ça n'était pas pour Aruns et Elysia, elle lui aurait volontiers balancé son verre à la figure; comment osait-il se moquer ainsi d'elle, alors qu'il ne la connaissait même pas!
Le choix fut vite fait: mr "freelance" passa aussitôt dans la catégorie "sous-merdes inutiles à éradiquer", à côté des cafards et des Carcs. Oui, parfaitement.
La catin se contenta de boire à petites gorgées, ses yeux indigos fixés sur son interlocuteur, puis vers Aruns quand celui-ci prit la parole, lui laissant le temps de peaufiner une réponse. Avec ce genre de brutes, il fallait faire dans la subtilité et en même temps, être assez clair pour qu'il comprenne.
Charybde sourit donc avant de déclarer:

"Eh bien, en voilà un humour mordant! On jurerait que je vous ai piqué, monsieur Hark ? Ne soyez pas si mal à l'aise, voyons. Tous sont acceptés ici."

Cette flèche lancée, elle ajouta, un peu plus sérieuse:

"Et contrairement à ce que vous croyez, nous avons quelques points en commun: je suis ici pour le travail, moi aussi. Et le plaisir, évidemment."

La dernière phrase fut ajoutée avec un clin d'oeil vers Elysia. Qu'il comprenne qui elle était, et comment s'adresser à elle, ça vaudrait mieux.

D'accord, gamine, tu veux jouer à ça...

Hart : Un taon pique toujours sans raison, milady. Alors c'est fort possible. Serait-ce pour ça qu'on vous ait accepté ici ? Vous m'en voyez fort aise.

Et un petit geste de la main, embryon de courbette à peine parodiée. Vu le regard qu'elle lance au couple qui l'accompagnait... Pas au vieux clébard qu'on apprend à aboyer. Même si d'ordinaire, celles que je croise sont moins chères que celle-là. Enfin je pense.

Hart : Que milady m'excuse, je ne pensais pas que votre personne eusse pu, un jour seulement, travailler de ses dix doigts. Je devais me tromper, toutes mes confuses.

Comme quoi, ça sert d'avoir une pilote éduqué.

Hart : Ça vous donnera un sujet de conversation avec votre coiffeur, le vilain
freelance mal élevé. Avouez que toutes vos copines vont vous
l'envier...

Bon, là, j'avoue que ce n'est pas de Romy...

Hart : Vous feriez bien de faire attention, milady. Les langues bien pendues, on se prend les pieds dedans quand on ne la rembarque pas dans certains lieux. Bon, ici, c'est vrai que... C'est plutôt tranquille...

Ennuyeux, même. Je ne peux même pas l'étrangler cette petite garce...

Charybde ne perdit pas son sang-froid. Cette petite joute verbale en disait long sur l'homme - il n'avait même pas relevé la faute, volontaire, de son nom. Comme quoi, s'il répondait, ce n'était pas par orgueil, mais presque pour continuer à prendre des coups. Un complexe d'infériorité... Divertissant.

"Je vous pardonne, monsieur Hark, il est vrai que vous ne devez pas être un habitué de personnes comme moi. Rien d'étonnant à cela. Et vous seriez surpris de savoir tout ce que je sais faire de mes dix doigts, et du reste."

Sourire appuyé, et retour de pression à la hanche d'Elysia. Tout va bien, mes amis, je m'amuse, là.


"Tiens, parlant de coiffeur! Vous voulez que je vous le présente ? Je suis certaine que vous seriez à son goût... Et puis, il aurait fort à faire! Remarquez, vu ce que ça vous coûterait, peut-être que ce n'est pas un choix judicieux financièrement parlant... Hum, oui. Non, je ne vous ferai pas l'honneur de vous citer dans mes prochaines conversations - aucune raison de s'attarder sur vous, vraiment! "

La menace à peine voilée de Hart néanmoins échauffa un peu Charybde.


"Ma langue n'a rien à craindre de vous, monsieur. Ce serait même plutôt l'inverse... Vous avez tout à perdre, à me la reprocher. Elle pourrait elle aussi vous surprendre de bien des façons..."

On reste calme, on sourit, on boit la fin de son verre et on regarde Elysia. Ah, qu'elle est belle. Réconfortant.