Préparation de l'opération Barca

Le lendemain, à huit heures du matin, Aruns et Elysia étaient au baraquement de leur cohorte, à Sérania même. Pas trop loin de chez eux, ils avaient même pu y aller à pied, après une heure de jogging comme tous les jours et une bonne douche.
En uniforme de service fraîchement repassé, béret pourpre sur la tête pour lui, chèche de la même couleur pour elle, avec leurs keffiehs kaki et noir, ils attendaient dans le secrétariat que leur supérieur ne les fasse entrer, conformément au rendez-vous pris trois jours plus tôt… Hier soir, tard, ils avaient envoyé un addendum sur une demande d’exercice ou d’affectation dans le secteur militaire LB781, en expliquant qu’ils connaissaient bien les habitants, que plusieurs des Velites de la manipule étaient originaires de là-bas, et qu’ils avaient des informations sur des unités impériales qui mettaient à sac la région.

Administration Nombre de messages : 1775 Date d'inscription : 18/06/2008

Le Tribun Alexeï Freig était un officier relativement compétent, qui avait atteint son grade au fil des combats de la guerre civile. Maintenant proche de la retraite, c'était également un homme politique qui montait progressivement au sein du Front Populaire, qu'il avait rejoint il y a sept ans. Tête de liste Socialiste à la Mairie de quartier de son arrondissement de Serania, il occupait, lors de son temps libre, le poste de conseiller municipal à la culture. Cet officier reconnu pour son savoir-faire, apprécié d'hommes qui avaient travailler sous ses ordres dans le camp des Rebelles, mais néanmoins vieux, n'avait, hélas, plus connu le terrain depuis longtemps.

On lui connaissait par ailleurs le loisir de musicien, auquel il s'adonnait parfois, lors des fêtes qui suivaient les célébrations officielles, en offrant un concert à la manipule.

Il accueillit Iulius d'une poignée de main, et après quelques formalités d'usage (éxécutées à la va-vite), il poursuivit :

[A. Freig] J'ai un peu regardé votre travail sur l'évolution des manipules sous vos ordres. Je dois avouer qu'il y a de bonnes choses à récupérer. J'essaierai de réfléchir à un moyen de former mon successeur à l'accueillir avec un sens d'ouverture. Vous n'êtes pas sans savoir que le Gouvernement, en dépit de ses couleurs politiques, essaye de faire en sorte de couper court aux tensions partisannes des militaires. Et il se trouve qu'il y a de fortes chances pour que mon successeur soit un proche de l'UDI, plutôt qu'un ancien officier Rebelle ...

Enfin, je suppose qu'il aura aussi de bonnes choses à vous apporter.

Il invita Iulius à le suivre dans son bureau et offrit un verre de Vin blanc des coteaux de Cyrenia à ses deux convives avant de poursuivre :

[A. Freig] J'ai lut votre rapport sur vos actions sur Erikea. J'ai appuyé votre demande de récompenses pour la troupe. Il semblerait qu'un Ordre du Mérite Militaire de Deuxième classe soit à l'ordre du jour, en plus du Brassard de la campagne d'Erikea, descerné à ceux qui ont servit pendant plus d'un an lors de nos opérations la-bas. Le Commandement est particulierement satisfait de vos opérations sur le terrain. Néanmoins, je vous rappelle toujours une chose. Parce que je le fais à tout les types qui sont décorés sous mes ordres. Mon grand-père disait des médailles que "ce ne sont que des bouts de métal. Ca ne coute pas cher au contribuable, et ça lui donne la sensation d'être important". Et Napoléon avant lui "On ne motive pas un homme à combattre pour trois sous par jours, ou pour une médaille". J'espère que ce ne sont pas ces décorations qui vous motivent Légat. C'est utile, mais uniquement pour attirer les filles. Et il me semble que vous êtes déjà bien équipé de ce côté là.

Freig s'installa derrière son bureau pour jeter un oeil au billet déposé par Iulius.

[A. Freig] Votre réaffectation a été approuvée. Prenez l'avion pour l'aéroport militaire de Vinemii, et envoyez vos hommes dans la ville de Morea. la troisième Légion de Vélites est déjà déployée sur place. Vous rejoindrez son commandement le temps de cette opération. N'oubliez pas de vous présenter au Préfet Chartraise. Je ne sais pas ce qu'elle vaut, mais je suis sûr qu'elle serra contente d'avoir un type comme vous à ses côtés. Des questions ?

Le tribun Freig, un type bien. Un officier honnête et droit, un vétéran, qui préparait déjà sa reconversion dans la politique. Peut-être un futur allié quand ce serait le tour d'Aruns, dans un futur plus ou moins proche ; à voir à ce moment.

Le tieffelin partageait son inquiétude sur le successeur à la tête de la légion. Il espérait surtout ne pas tomber sur un vieux croulant immobiliste ou sur un gars tout juste sorti de l'académie qui ne connaissait rien au terrain, même si un proche des idéaux impériaux pourrait faire très mal à l'esprit même des Velites, tout ça pour des raisons politiques. Aruns ne pouvait pas dire avoir fait la guerre civile, mais il avait appris auprès de vétérans et montré assez d'ouverture d'esprit pour changer sa façon de faire les choses. Et l'appréciation de son OPEX le combla d'aise, il en toucherait un mot à ses hommes.

Aruns écouta soigneusement le briefing du Tribun. Concernant les médailles, il était d'accord, mais il savait que cela pouvait aider certains de ses soldats à se sentir considérés. Mais ils combattaient plus pour Séranon que pour du fer... Comme le disait une vieille médaille de l'Empereur de Prusse. Et quand aux filles... Oui, il était équipé, mais quand même, des petits extras faisaient toujours plaisir.
Bref, passons. Ce domaine n'a pas à être exposé, ni à être forcément lisible. C'était dans la sphère du privé. Comme il avait dit à ses Iulii : "Faites ce que vous voulez en privé, mais en combat, donnez-vous à fond pour vos officiers !"... Oui, bon, c'est ce que faisait toujours Elysia, certes.

Quand il apprit que son redéploiement était accepté, le Légat lâcha un œil vers sa femme, dont le regard sembla s'allumer... de haine, si on la connaissait. Pas de l'excitation de la bataille ou de revoir les siens, mais de la pure haine dont seulement trois autres personnes étaient au courant. Même les toubibs de l'armée Séranienne n'étaient pas au courant. Une mission sans doute, au final, de maintien de l'ordre, encore, de protection et un peu de poursuite. Plus de moyens, plus variés, comme peut-être de l'artillerie ou des satellites de surveillance, ce qui lui facilitera la tâche et lui permettra d'être plus efficace sur le terrain.

"Aucune question. Je verrais sur place les détails des opérations qu'on me donnera à faire. En tout cas, je vous remercie de toutes ces précisions. J'espère aussi vous revoir avant votre retraite, tout de même."

Un sourire, quelques banalités et le couple sortit. Ils retournèrent rapidement chez eux pour se changer, passer leur tenue de combat, et ramener leurs sacs.

***

A dix heures, comme prévu, la Manipule Iulii était au complet, rassemblée, à peu près en ordre. Il ne fallait pas en demander trop aux Velites, même si l'entraînement et la réorientation avait commencé, c'était un peu bref comme intervalle de temps.
Aruns était devant eux, monté sur son Jussum pour un petit discours de circonstance.

"Manipule Iulii !
Mes félicitations encore pour Erikea. Le Commandement est satisfait de nos résultats là-bas, et moi aussi. J'espère bien que cela n'est qu'un début !
Comme on le supposait, on reste sur Séranon. On part dans l'arrière pays, à Morea. Oui, je sais, certains d'entre vous viennent de la région, et tant mieux, nous pourrons utiliser leurs connaissances. Là-bas, nous serons sous le commandement de la Legio III des Velites, sans doute pour un peu de protection, de maintien de l'ordre et, surtout, de chasse aux impériaux rebelles. Mais nous verrons cela là-bas.
Première étape : Vernii, par avion. Nous rejoindrons Morea par la route, et établirons nos quartiers là-bas. Plus d'informations quand j'aurais rencontré le Tribun et le préfet Chartraise.
Manipule Iulii, Viam Sternere !"

Le cri de guerre fut reprit pas tous les hommes, y compris ceux de la CSS ; même s'ils n'étaient pas combattants, ils étaient vitaux pour Aruns, et celui-ci tenait à ce qu'ils se sentent membres de la Manipule. Ils se précipitèrent ensuite vers les Maravedor modifiés, celles-ci couvertes de sac à dos, le reste des affaires entassées dans les camions de la CSS.

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