Raid sur Nagapatam

La salle de planification des opérations ou du moins ce qui en tenait lieu était un endroit en plus ou moins bon état. L’étanchéité était tout naturellement assurée mais le reste n’était pas brillant. L’hologramme était poussif et l’ensemble, était de toute évidence, daté.

Etaient là une douzaine de pilote de chasse, ça se voyait à leur dégaine, ainsi que plusieurs pilotes et officiers d’astronefs plus légers. Frederique s’assit calmement, sorti un carnet et en cela imita les autres. Quelques pilotes parlaient d’attaquer le Titan et d’investir les hangars en un minimum de temps, beaucoup n’y croyaient pas, l’escadre étant de toute évidence trop petite pour jouer à ça. Une paire de pilotes discutaient avec animation sous le regard intéressé d’un plus jeune de comment descendre deux autres chasseurs en une seule manoeuvre de groupe. Trois autres quant à eux échangeaient des conclusions sur comment parvenir à placer son missile face aux rétro-laser de tout bâtiment moderne... Enfin beaucoup étaient silencieux et jetaient de temps à autre des regards vers Théodore Morgan et un jeune homme moustachu, arborant au coup le collier de soumission des Ixcar, ces humains réduits en esclavages par les carcars et utilisés au combat (le résultat était craint depuis des siècles). L’homme était visiblement un officier, peu amène et devait être la propriété du chef mercenaire.

L’on attendit peu, Olsen Willsdorff, l’officier tactique (et accessoirement chef d’Etat-Major) entra et inséra immédiatement une puce dans le projecteur holo. Le silence se fit. Une géante gazeuse était apparue au milieu de la pièce, elle disposait de sept satellites notables ainsi que plusieurs plus petits.

-Voici les image de la dernière reconnaissance effectuée par Stryker, déclara Willsdorff en faisant un signe de tête vers un pilote ayant manifestement la quarantaine. Il semblait même être le doyen de toute la bande de types qui composaient le groupe de chasse de l’escadre.

-Notre cible est une colonie agricole donc les entrées sont visibles... Là.

Willsdorff agrandit l’image, puis passa à une autre, prise avec zoom. Le cratère -assez enfoncé- de l’un des astres, relativement petits, avait été aménagé.

-Voici Nagapatam, colonie troglodyte de 30 000 habitants. La cité est sous le contrôle des Gomenzo depuis quinze ans et consacre environs la moitié de sa capacité de production agricole aux stupéfiants divers et variés. Le clan Gomenzo-Diaz y entretient une troupe de deux mille mercenaires en plus d’un milice de huit cent hommes, de qualité manifestement négligeable : elle n’existe que pour mater un soulèvement ; nous disposons de trois milles hommes dont huit cent fournis par le commandant Morgan. Il se produit à Nagapatam de la came de très haute qualité et il s’agit de la principale source de revenus de la branche de la famille que nous visons, les Gomenzo-Diaz. C’est également le fief de Roméo Gomenzo-Diaz et donc nous avons de bonnes chances de tomber là dedans sur un de ses proches voir même... Sur l’homme lui-même. La garde spatiale serait composée de trois canonnières, de deux forceurs de blocus et de trois cargos légers peu armés. Une goélette vient parfois ravitailler ici, elle pourrait donc se trouver là.

La cité ennemie ne dispose que d’une grande entrée. C’est à la fois un avantage et un inconvénient. Elle est protégée par sept canons légers et deux canons moyens, pointés vers l’espace. Le tir est guidé par deux radars, un de veille et l’autre de poursuite. Ce système à un point faible que nous allons exploiter.

Les radars, pour des raisons de protection, n’ont pas été déployés aux points les plus hauts, et subissent les interférences provoquées par la circulation de corps naturels en orbite du petit astre. C’est ici que devront intervenir les pilotes. Nous disposons de seize chasseurs, trois navettes et d’un gunship J Warick. Navettes et gunship peuvent embarquer environs cent quarante hommes vu qu’une partie du groupe d’assaut sera lourdement chargé avec jet-packs et engins lourds pour forcer les sas. C’est plus que suffisant pour une première vague d’assaut.

Nous allons devoir opérer selon un timing serré et sans répétition. Si jamais nous étions repérés dans les environs cela nous couterait le raid. Nous allons opérer en quatre temps afin de nous rendre maîtres des hangars donnant sur l’espace. Nous devons pour cela neutraliser les défenses, investir les hangars avant que tout ne soit verrouillé et ne nous condamne à passer là dedans au forceps et donc à perdre beaucoup de monde et de temps et enfin assurer l’envoi des renforts et donc assurer la transition de l’espace vers la ville.

Pour cela nous allons devoir passer par l’angle mort des défenses de l’adversaire qui n’en n’est pas vraiment un à proprement parler. Afin de rendre ses radars moins vulnérables, l’ennemi a omis de placer un poste de veille électronique sur son Est. Des vaisseaux légers en approche rapide pourront passer la crête du cratère et plonger au centre du cratère, droit vers les baies blindées dont elles s’empareront. La chasse escortant ces vaisseaux légers devra préalablement neutraliser les deux radars au missile, ce qui désorganisera la défense ennemie le temps que leurs équipes de défense passent en contrôle manuel et surtout, se contentent de viser avec l’aide de lentilles optiques ce que dans l’espace...

Les pilotes sourirent.

-La chasse, divisée en deux groupes, devra, avec l’un, attaquer les radars et les portes blindées d’une passe et de l’autre neutraliser le reste des défenses pendant que nos trois transporteurs débarqueront leurs troupes afin de saisir les hangars mais aussi immobiliser les appareils qui se trouvent dedans. Cela facilitera la tâche du spatial et assurera une arrivée plus rapide des troupes vers la ville.

Notre première vague d’assaut sera composée de quatre-vingt soldats commandés par le lieutenant Venislos Antoneçu, poursuivit Willsdorff en désignant l’homme au collier servile. Il dirigera les troupes du commandant Morgan affectées à la première vague. La majorité de la troupe du commandant resteront à bord des astronefs pour les abordages de vaisseaux s’il y en à. Et moins il y en aura, plus vite ils seront sur place. Le reste de la première vague sera composée des autres mercenaires dont nous disposons. Ils seront principalement délivrés par le J Ship et notre baleinière Erebus. Notre cargo ST 100 suivra avec cent vingt hommes.

Une fois en place nous n’aurons aucun mal à assurer le transport de trois cent hommes par rotation si l’on rajoute notre ST 100 ce qui devrait, en une quinzaine de minutes, permettre de poser six cent hommes en plus de la première vague. Bien sûr nous pourrions bombardement depuis les vaisseaux mais une telle manoeuvre nous imposerait d’avancer au milieu de très imposants décombres des hangars. Oh il y en aura même comme ça mais nous ne serions pas en mesure de placer notre sas de secours rapidement et donc le transfert des hommes se ferait lentement, trop lentement, et cela donnerait le temps aux défenseurs de solidement se barricader.

J’insiste sur l’importance de la vitesse dans cette attaque. Nous devons nous rendre maîtres au plus vite des hangars et de leurs contrôles. J’ajouterais que plus nous capturons de vaisseaux intactes, plus les primes seront grosses, ça vaut beaucoup d’argent un vaisseau spatial...

-Des questions ?

Bien. Alors non seulement être réveillé d'une sieste n'est pas drôle, traverser un navire énorme -pour mes pauvres gambettes- c'est carrément pas jobard, mais s'entendre dire que la résistance en face, c'est 2000 gomenzos surarmés et 800 pékins en string, j'aime encore moins. Alors penser que ces gradés auront le cul vissé sur une chaise... Calmos, c'est eux qui te paie. Bon, on note d'abord : les artilleurs seront à deux. Les prussiens suffiront. Les deux autres m'accompagneront avec les russes. On va leur montrer, ces couilles-molles au col amidonné, qu'on en veut. Des questions ? Laisse moi réfléchir...

Hart : Oui.

Romy : Oui.

Ah. Un regard à ma pilote. Bon. Je vais faire valoir mon... rang. Pas grade, rang.

Hart : Y'a-t-il une estimation du nombre de gardes directement présent derrière "l'entrée" ? L'intégralité prêts au combat, ou une dizaine de ballerines en train de se mettre une mine ? Combien de temps estimé entre l'attaque, la prise de position, et l'arrivée de leur renfort ? Et le temps de latence avec l'arrivée de NOS renforts ? Les nôtres mettront quinze minutes, ce qui donnera combien de temps au Gomenzo pour reprendre les lieux en nous faisant flamber ? Quelle distance entre l'entrée et leur QG ? Présence de matériel lourd du coté de l'ennemi ? Si le Gomenzo est une cible, est-on sûr qu'il ne dispose d'aucun système pour se barrer en douce ? Une petite patrouille de chasseurs en retrait pour s'en assurer ? Pas d'autres questions.

Mange ça, pépère, suis pas stratège, mais je sais que ça, ça va déterminer les chances de survie des gars au sol. Et j'aime survivre. On se cale une clope, on l'allume. Tiens, elle, elle attend la réponse de l'autre avant de poser la sienne...

Romy : Egalement une question au niveau... temporel. Vous parlez de l'arrivez du "J-Ship" en même temps que les chasseurs sensés neutraliser les défenses, ce qui l'expose à des dégats collatéraux. De même pour l'Erebus. Avez-vous prévu un temps de latence entre le début de l'hostilité et l'arrivée des troupes, afin d'éviter de perdre un, voir deux de nos trois transports ?

Pas con, tiens. Enfin, j'en ai l'impression...

Willsdorff écouta jusqu'au bout et répondit immédiatement.

-L'estimation du nombre de mercenaires de l'autre côté est de deux cents au maximum. Le reste ne devrait pas être prêt au combat. Quant aux miliciens, même armés il y à de fortes chances qu'ils soient quand même des ballerines à faire danser.

Le temps de latence est de sept minutes et demi, marge comprise, pour une rotation de trois cent hommes. Si matériel lourd il y à, il s'agira au mieux de canons légers. Nos troupes emporteront matériel antichar et fusils anti-barricade FAM 1, largement de quoi interdire toute forme de dispositif destiné à vous retarder. Les combats se feront essentiellement en milieu clos à l'exception des hangars. Toute la place est rentabilisée là dedans, ya pas vraiment de quoi manoeuvrer des pièces lourdes... Nous estimons leur délai de réaction à quatre minutes pour les corps de garde proche, puis neuf minutes pour le reste.

Aucune reconnaissance n'a pointé d'autre hangar ou sortie. S'il en existe une, il prendra un coup de canon bien senti. Une fois la défense de contre chasse neutralisée, la chasse se repliera pour apporter un soutien plus éloigné, en cas de fuite...

Pendant l'assaut tout le monde devra garder sa tenue pressurisée, il se peut que l'ennemi tente de des dépressurisations localisées. Les systèmes de contrôle centraux se trouvent à quelques centaines de mètres. Cela n'aura cependant qu'une incidence mineure sur la bataille. Ce genre de villes troglodyte dispose de contrôles localisés en cas de panne du système principal. Il va falloir les forcer un à un ou pousser la population à se soumettre, ce qui est chose faisable.

Fred posa sa question, Willsdorff répondit aussitôt.

-La première vague de frappes aura lieu avant l'alunissage des navettes qui se déroulera immédiatement après. La seconde vague aura cependant lieu pendant que vous débarquez. Nos pilotes sont assez précis pour ce genre de boulot.

Un tour de la salle permettait de voir que les pilotes en question avaient manifestement leurs heures de vol derrière eux.

C'est bon, papi Hart est content, gamin. Alors... Sept minutes trente à tenir contre les zigues de Romeo. Marrant de dire ça... Ché pas pourquoi, mais ça sonne marrant... Bon. Plus rien à dire, et personne d'autres n'ouvrent sa gueule. C'est pas que je t'aime pas, pépère, mais j'ai un paquet de bastos à préparer, une lame à affuter et des mercos à réveiller. Ciao la compagnie, magnifique demi-tour sur les talons, très militaire...

Bon, d'accord, envoyer par erreur son poing dans le visage d'un pilote assis, l'envoyant valdinguer sur son voisin de derrière, c'pas top. Oups. Une seconde d'arrêt... Puis on redémarre vers la porte.

Hart : S'cusez, taille poids, tout ça, j'ai oublié mes vitamines, je vieillis, j'ai de l'arthrite, enfin peut-être... Pour les plaintes et les informations, demandez à mon officier tactique. Elle s'y connait, elle me supporte depuis un bail.

En m'éloignant de la pièce, direction le hangar, j'entends comme un cri de rage toute féminine. Aïe. Je suis content de ne pas être un gomenzo, moi. Parce que si on lui en donne l'occasion, elle va leur faire payer cher mes conneries. Bon, j'ai des ogres à aller préparer, moi. Quelques lattes. Dieu qu'il est bon d'être un irresponsable responsable, les gars. Ooooh oui. Et heureusement qu'on me paie pour mon boulot, pas pour ma faculté à les écouter déblatérer leurs sornettes comme des imbéciles imbus d'eux-mêmes.

Voila, on y était. Serrés comme des sardines dans les soutes de MON vaisseau avec des mecs qui pour la plupart allait y passer dès la fin du débarquement. Augmentant notre part, je dois l'avouer. Ce n'est pas plus mal. Dans mon esprit, des chiffres s'alignent, ainsi que le moyen de prendre la plus grande part possible. Ce qui vaut cher, ce sont les vaisseaux. Un vaisseau qui décolle = un vaisseau qui ne rapporte pas. Y'a des pilotes et des mécanos qui vont morfler. Un regard sur mes deux beaux chantres de guerre. Pas à dire, avec deux armoires à glace de leur carrure, je ne risque rien... Eux iront flinguer du pilote au sol, même sans jet-packs, pas question qu'on laisse cette manne nous échapper. Moi, ce sera le second groupe, avec Jimmy et le Borgne. Pourquoi regardent-ils tous mon armure comme ça ? Oui, parfaitement, de la classe et du doigté, les gomenzos auront le droit au smoking armurier pour se faire dézinguer. Et les frangins ne sont pas en reste. Leur dégotter ces exo-armures, pour leur taille -des modifs avaient été nécessaires-, c'était un miracle. Mais il avait l'air de fiers porteurs de mort armés jusqu'aux dents.

Les portes s'ouvrent, et laissent sortir les flots de mercenaires, j'adore ce moment. Celui où l'on voit l'oeil humide les petits jeunes foncer au turbin sans prendre garde à leur arrière, et où l'on voit le nombre de part à partager diminuer. Aaaah, j'adore les jeunes. Bon, ce n'est pas tout ça, mais le vieux con va mériter sa paie. Mais pourquoi diable personne n'a pensé à emporter d'ex... J'en ai ? Ah. Non. Bon. Dommage. Les deux jumeaux se dirigent lourdement vers les vaisseaux, avec une instruction claire : pas de prisonnier. Un bon gomenzo, aujourd'hui, est un gomenzo mort. Les pauvres. Quand à moi, c'est dans le chaos généralisé de ce hangar que je me dirige à petites foulées vers cette bande de braillards. Ne pas paniquer, ne pas stresser. Les choses sérieuses n'avaient pas encore commencé. Deux-cents mercenaires, donc, en estimation... Et pas un soupçon d'organisation des forces mercenaires, bordel. Ils cherchent uniquement à avancer le plus vite possible, sans même se demander si les gars d'en face ne vont pas rappliquer.

Tiens, en parlant de hors-d'oeuvre... Tu étais qui toi ? Pas de bol, j'aime pas qu'on me rentre dedans. Zut, j'ai tâché le sol, c'est malin. T'avais qu'à être dépressurisé avec les autres, aussi. Bon, on réfléchit encore... Les débris offrent pléthore de couverts lourds. Assez facile à tenir. Et tout doit être installé en sept minutes avant que les autres n'arrivent. Sept minutes, moins celles passées dans ce bordel.

Les deux artilleurs ont l'air de bien s'amuser avec. Même s'ils me suivent au doigt et à l'oeil. Tiens, quand on parlait des deux-cents, en voila une bonne dizaine qui s'amène sur le coté, tenues pressurisées enfilées à la hâte sans doute, droit vers les casseurs de vitrines. Un geste de la main vers eux. Si mon arme ne sert pas vraiment à les clouer sur place, les fusils de mes hommes si. C'est à la FW2 de Jimmy de rentrer en action, freinant les gardes, les clouant sur place, même, tandis que je me jette à couvert, suivi de près des deux gars. Voila, là ça sert de s'exciter. La balle qui frôle mon crâne me l'indique avec véhémence, d'ailleurs... Ok, qu'à cela ne tienne.

Deux secondes. Je n'ai pas besoin de plus pour atteindre le plus crétin du groupe, hors de tout couvert. J'adore ce système de visée, ça devient trop facile sur certains. Comme s'ils se mettaient eux-mêmes sur la trajectoire des balles. Et un homme qui part en arrière au ralenti. Bon, maintenant qu'ils sont repérés, on ne devrait plus être les seuls trois clampins à tirer... Si les jumeaux ont un problème, ils m'appellent... Espérons qu'ils n'en auront pas, car à moins d'un problème de maths -et encore, basique-, je ne vois pas comment les aider, eux...

C’était une bataille sanglante et expéditive. Les deux jumeaux s’en sortaient fort bien et ne rencontraient pas grand chose susceptible de s’opposer à eux. Les combats, rapides, se déroulaient dans un certain désordre liés aux décombres. En effet, ils gênaient les mouvements et étaient générateurs d’erreurs. Les techs, souvent non armés ou n’ayant à portée que des outils certes dangereux mais sans comparaison avec les armes dont disposaient les mercenaires, n’offraient qu’une résistance symbolique. Un coup de flingue, un coup d’épée, et c’était fini. La soldatesque en revanche était considérablement plus menaçante. Les quelques membres d’équipage des vaisseaux qui n’avaient pas été dépressurisés opposaient une résistance farouche et avaient bien l’intention de survivre à cette journée.

Un équipage de huit hommes traversa à coups de tout ce qui leur tombait dans les mains une groupe d’une douzaine de types, ils foncèrent dans un bulwark modifié en canonnière et, au prix de deux des leurs fauchés par Jimmy, se retranchèrent à bord du vaisseau. Jimmy s’élança.

-La trappe de visite du train, vite ! Avant qu’ils ne verrouillent tout.

Ils étaient trop peu pour décoller et filer tranquillement au nez et à la barbe de tous par contre pour balayer le champs de bataille...

Au niveau de la salle d’observation la bataille tournait au carnage pure et simple. Le groupe d’Antoneçu était parvenu à s’y établir mais demeurait à cheval sur les panneaux de contrôles, bloqué dans sa progression par une partie des troupes de réaction des Gomenzo qui cherchait à utiliser la salle de contrôle comme poste de tir. L’on entassait les corps mais les troupes de choc de Théodore Morgan prenaient l’avantage...lentement. Il y avait déjà vingt-deux corps dans la petite salle de contrôle.

Le ST 100 de transport apporta une bouffée d'air frais en déposant une centaine d'hommes supplémentaires qui furent poussés à la bataille. Une vingtaine de techs sortirent avec du matériel qu'il commencèrent à pré assembler sous la protection d'une vingtaine d'hommes....

......


Dans l'espace Romy filait le plus vite possible vers le Circé. Sloops et goélettes du SGC avaient engagés le combat contre une goélette de classe Hontor, que Turjpat cherchait manifestement à capturer, ce qui risquait de faire durer la bataille de ce côté là... et monopoliser quelques troupes d'assaut. Le Forceur de blocus avait été atteint aux moteurs par un tir bien placé et un sloop fonçait déjà dessus pour l'arraisonner. L'équipage avait refusé de ce rendre, visiblement pas envie de finir dans un enclos carcar... Aucune trace des deux chasseurs, visiblement pulvérisés sans préavis par un groupe Eperon...

D'accord. Si l'Enfer existait, ça devait avoir cette gueule. En rajoutant des cornes aux mercenaires, les piques, ils les avaient déjà. Et le simple fait que ce genre de lieu est fréquent dans la galaxie me fait penser que non, celui-ci n'existe pas. Mais quel Dieu perdrait son pognon à recréer ce que l'homme crée si bien tout seul ? Merde, un peu de confiance en nos compétences ne fait pas de mal ! On est bon, et c'est t...

Un cri me réveille. Pas de douleur, mais d'ordre. Je préfère "d'indication urgente à caractère amical". C'est mieux, entre nous, et ça me permet de continuer mon enculage de mouche perpétuel. Deux corps au sol. Ca c'est Jimmy. C'est bien mon grand, t'auras un sucre. C'est très canin comme nom, réflexion faite...

On sort du couvert d'un bond pour se précipiter sur le vaisseau. Bordel, pourvu que les tireurs ne nous prennent pas pour cible... Heureusement que la cible n'est pas trop loin, et qu'ils n'ont pas démarré cette horreur. Je n'ai pas vu combien ils étaient, mais le vaisseau sera sans doute dangereux pour nous. Jimmy est le premier sur la trappe, tentant de la repousser de toutes ses forces. Pas comme ça, coco. Avant le contact, je laisse le fusil en bandoulière, et décroche de ma ceinture une de ces sympathiques grenades à concussion... Sans grande précaution, il faut bien l'avouer, je m'agrippe à la trappe d'une main, tentant de créer une petite ouverture. Oui, c'est petit, mais largement suffisant. Bonjour messieurs, la poste a oublié un colis. Laissez tomber le reçu, on fera sans. Le paquet déposé, je me plaque sur la trappe. Faites que cela tienne. Tiens, amusant, c'est eux qui pousse maintenant...

Une explosion étouffée par le métal et le manque d'air du hangar. Choc dans mon estomac. De quoi recracher mon petit dej'. Mais je tiens bon. Saloperie. Enfin à l'intérieur, ce devrait être un charnier. Plus que ceux des autres compartiments à dézinguer. Je me décale sur le coté, la tête dans les étoiles, et l'estomac dans les chaussettes... Si avec ça, je n'ai pas la prime de risque et un lumbago dans mes vieux jours... Les deux autres ouvrent la trappe sans aucune résistance, et s'engouffrent à l'intérieur. Plus lentement, je les suis à l'intérieur, prêt -vaguement- à continuer le carnage...

Jimmy entra le premier, suivi du compère. Les deux types du poste de commande étaient bel et bien morts, et il faudrait astiquer si jamais l'on voulait s'asseoir ici à l'avenir. Les derniers des six types restants, prisonniers de leur propre forteresse, n'opposèrent que peu de résistance. La FW 2 nettoya une pièce seule ou presque, le sixieme gomenzo, blessé, fit le mort pour tenter de canarder la derrière. Mais l'on apprenait pas au borgne à faire des grimaces. Il tira sans préavis.

Dans le hangar un dernier carré de tech et de mercenaires (une quinzaine de malheureux) décidèrent de tenter leur chance sur Carcaran et voulurent se rendre. Le temps que l'on s'en rendit compte, unedizaine de coups de FAM 1 et des rafales de fusils ramenèrent ce nombre à huit...

Antoneçu quant à lui achevait de prendre la salle de contrôle et son sas dans un corps à corps acharné. Heureusement les commandes étaient encore fonctionnelles.

La vingtaine de techs débarqués, réquisitionnant quinze mercenaires, commença à installer une porte provisoire au hangar afin de pouvoir le pressuriser. Les mercenaires reçurent l'ordre de dégager le passage des décombres et fissa !

Antoneçu finit par s'adresser à tous sur la fréquence générale.

-Nous disposons du contrôle des sas. Que ceux qui ont pris le contrôle du Bulwark le déplace le plus possible sur le côté en cas de contre attaque jusqu'au hangar. Les canons doivent pouvoir balayer toute troupe de contre attaque. Lieutenant Forelli, menez vos deux escouades à l'extérieur afin de prévenir toute contre attaque en surface par le biais d'accès détournés. Il n'y en a normalement pas mais notre position est trop précaire pour prendre un risque de trop.

Que le reste se mette en position afin de tenir les trois sas du hangar menant au reste de la ville. La vraie contre attaque ne va pas tarder.

.....


Romy était en phase terminale d'atterrissage. Dans le hangar, un chasseur ballon noir, Eperon 2-2, s'apprêtait à décoller. Il avait manifestement fait un carton sur les deux chasseurs sortis sous son nez il y à quatre minutes. Un peu plus loin, le Yawl classe Svezig achevait d'embarquer ses 17 mercenaires (certains étaient debout à bord). La baleinière Erebus suivait de près le Warick qu'elle pilotait. Dans les sas du pont d'envol, le reste des troupes d'assaut attendait...

Dératiseur est mon second métier. Faire sortir ces enfoirés de leur cachette fut un jeu d'enfant. Joli réflexe du vieux briscard, qui remet LES balles en jeu, direct dans le foie de l'équipe adverse. Batteur expulsé. Oh yeah... Bon. C'est pas que je m'ennuie mais... Tiens, une communication générale. Ceux qui sont dans.... Ouais, c'est nous pépère, on est là. Bon. Un regard sur mes deux artilleurs. Heureusement que je n'ai pas pris les russes avec moi, on aurait été dans la panade, la belle.

Un simple signe de la tête. Eux aussi ont leur communicateur. Le Borgne préféra snober le siège, le cadavre dessus ayant malencontreusement laissé pas mal de fluides vitaux sur le cuir. Je le comprends, mais il va choper une scoliose le pauvre... Gomenzo au combat, même dans la mort ! Jimmy s'active de son coté aussi pour bouger l'engin. Ce qui me chiffonne, c'est que ce machin est bien trop gros pour être manié à deux. Sauf si mes deux foutus gars décident de me donner tort. Bah tiens. Bandes de sodomites vandsiens, dépravés de la nébuleuse... Ingrats même.

Manifestement, être à deux, c'est suffisant pour le décaler dooouuucement -on a le temps de prendre quelques charges dans la coque, à cette vitesse...- au point prévu, canon tourné vers le danger. Etrange, mais je me sens inutile ici. Bon.

Hart : Restez là, tout les deux, vous vous occuperez de distribuer les cartes de visite aux Gomenzos s'ils viennent. Oubliez pas de leur sourire...

Et me voila repassant par la trappe. Je laisse mon fusil en bandoulière. Quelle misère, pas un chargeur complet d'usé. Je me sens vieux. A une époque, j'aurai chargé canon en avant, j'aurai tiré dix balles pour une touche... La beauté du geste quoi. Et aujourd'hui, mes balles vont au bon endroit, horreur... Bon, ça fait des économies.

Tout le monde semble occupé à déblayer. Autant les aider un brin. Tout en me dirigeant vers les "Bobs les Bricoleurs version Apocalypse", je cherche la fréquence des jumeaux.

Hart : Alexander, Dimitri ? Comment ça se passe au hangar ?

Inutile de dire "A vous", ils vont croire qu'ils doivent parler en même temps, ces imbéciles...

L'espace est bien dégagé, température idéale, pluviométrie zéro...
Ah ah ah.
On est bien obligée de se faire des petites blagues toute seule pour se détendre. Bon, on en est où, là ? Ah oui. Ouverture porte et embarquement immédiat de la chair à canon.

L'appel d'Antoneçu la fait fermer les yeux. L'attaque la plus violente ne va pas tarder... Il faut faire vite.
Romy lance l'appel radio général vers la base - des fois qu'ils ne l'auraient pas vue arriver, ces crétins.

"Eperon 3-3 pour la base, embarquement du second groupe! C'est parti messieurs on se bouge le trognon, fissa!"

Communication aussitôt coupée, elle effectue quelques vérifications machinales histoire de s'occuper. Lampes toutes allumées, les moteurs tournent bien, pas de perte d'énergie, tout va bien. La pilote est dans les starting-block, ce genre de mission basée sur le timing la rend un peu nerveuse; nerveuse pour ceux au sol, évidemment. Il serait de mauvais ton de perdre son équipage, quand même...
Un coup d'oeil derrière son épaule. Les gros balourds sont en train de faire tanguer le vaisseau, ma parole! Pfff...
Presque à contrecoeur, elle relance une communication radio sur la fréquence de Tomas Hart. Concentrée sur ses écrans, attentive aux secondes qui s'égrènent, elle parle, ton aussi net et précis que d'habitude:

"Ici Eperon 3-3. Hart ? Toujours en vie ? Comment va le charnier ?"

Elle écoute la réponse tout en actionnant la fermeture des sas. Tant pis pour ceux qui n'avaient pas fini de grimper! Trois minutes, c'est beaucoup trop. Les gaz sont remis (image métaphorique bien sûr), et le J-Ship décolle en douceur, pour s'éloigner comme une flèche en direction du hangar.
Hart, bon Dieu, réponds.

Réponse des deux jumeaux. J'avoue que je ne m'attendais pas à mieux de leur part. Pourvu qu'ils aient toujours un Gomenzo à tailler en pièce, histoire de ne pas, crise de manque oblige, se tourner vers un de nos gars pour se passer les nerfs... ça m'énerve de ne pas pouvoir les diriger... Ils vont rapidement bloquer si personne ne leur donne d'instructions.

Un crachotement dans mon écouteur. Ca, c'est une communication lointaine. Bingo, la voix de la princesse des glaces qui résonne. Elle s'inquiète de ce qu'il se passe en bas ? Si c'est pas choupi, ça...

Hart : Toujours en vie, hélas pour toi. Ici bas, on s'amuse bien, mais toi, les vacances dans le ciel étoilé, ça se passe ? Tu ne t'ennuie pas trop ?

Ouais, c'est vrai quoi, c'est facile dans les airs et dans l'espace : silence, confort, peu d'effort physique, tu ne vois pas sur qui tu tire, la machine vise pour toi, tu es aidé de mécanos compétents et d'artilleurs délirants... Une surprise-party, les revenus en plus ! C'est plus chaud en bas, déjà.

Un regard sur le Borgne, un petit signe de la main, lui indiquant de me suivre. Il fallait... Bingo. La plaque de fer, ici, ferait l'affaire. Comme quoi, le développement durable, ça a du bon. En la soulevant à deux, ça devrait aller. Précaire, mais solide, ça évitera une bastos perdue. Droit vers l'entrée théorique de leurs forces. Oui, normalement ils devraient arriver par là... lles trois sas. Ce que je n'aime pas, c'est ce "trois"... Trois entrées potentielles. Et pas une mine sur moi pour en faire sauter une. J'aurai du y penser avant de prendre la route.

Le Borgne amène lentement de quoi faire tenir notre abri de fortune. Abri suffisamment largue pour trois quatre gars en nous comptant. Et je suis pas égoïste, pour ce genre de truc. Evidemment, si personne ne nous aide, on aura eu le temps de tous y passer avant d'avoir pu installer ça...

Petit soupir soulagé et agacé en entendant la voix éraillée du capitaine. Romy pesta en voyant l'appareil qui lui grillait la politesse, et résista à l'envie de le poursuivre pleins gaz. On se calme, on est en mission, là. Bon. L'autre était en vie, et visiblement d'humeur badine. Il allait moins rigoler, tout à l'heure...
Tiens, confirmation de ce que je pensais. L'ennemi se réveille, il saute du lit déjà armé...
La pilote soupira à nouveau, et se stabilisa devant le hangar.

"On dégage!!" hurla-t-elle sans ambages à l'équipage à bord en ouvrant les soutes. Qu'ils se grouillent! Elle n'avait pas l'intention de moisir là pour se faire canarder! Profitant du temps mis par les combattants à débarquer, elle répondit à Tomas.

"Bof, des petits embouteillages, la circulation est pas terrible dans ce coin, mais on se débrouille... Eh, faites gaffe à vos miches, messieurs, la contre-attaque est lourdement chargée, alors pas de bêtises, hein!"

La prussienne trépignait presque d'impatience. Repartir, vite, en position. Jaune 22, il était où celui-là ? Petit coup d'oeil aux écrans... Repéré. Repérée aussi, la fausse flotte Gomenzo qui faisait semblant de se déployer devant elle. Pfff. Crétins.
N'empêche, on ne l'aurait pas prévenue, elle aurait tiqué. Un peu.
Bon, ils se dépéchaient, les zigs ? A bout de patience, la pilote décrocha à nouveau sa radio interne:

"On se bouge, les gars, allez, allez! J'ai autre chose à faire, moi!"

Et puis zut! Elle entama la fermeture du sas, et commença à amorcer son décollage. Tant pis pour les traînards! On n'était pas au club med, non plus...
Finalement, ils étaient tous sortis, tant mieux. Bon, direction Jaune 22. Bouge pas, mon pote, la cavalerie arrive.
Enfin, façon de parler.

Tomas Hart

Les Gomenzos s’approchaient, les échanges de tirs redoublaient de violence et, derrière leurs abris de fortune, les mercenaires du SGC commençaient à riposter. La bataille commença réellement lorsque quatre murs mobiles s’arrêtèrent et que deux fois plus de mitrailleuses ouvirent le feu. Les traits d’énergie plurent sur les positions des assaillants qui ripostèrent tant bien que mal. Une quarantaine de corps renforcèrent les barricades contre le gré de leurs anciens occupants. Sur l’arrière des troupes tenant les trois sas, quelques petits groupes des troupes d’Antoneçu se frayèrent un chemin jusqu’au second rang du front. En haut de l’escalier, l’on se préparait aussi. Le signal tomba lorsque Romy largua ses troupes de son appareil, plutôt vite. À peine les troupes arrivées au plus près de la ligne de front, Antoneçu donna son signal.

-À nous. 


Subitement, les défenseurs reçurent l’ordre de s’écarter et une quarantaine de mercenaires armés de jet packs filèrent sur cent mètres à toute vitesse, arme blanche dans une main, pistolet ou mitraillette dans l’autre. Et les barricades mobiles furent prises d’assaut. Trois hommes périrent contre les parois, leurs jet packs touchés. Le reste se battit avec violence, accordant un répit aux défenseurs des barricades. Le Borgne en décida autrement.

-Et si on fonçait aussi. La cohue empêche qu’on nous tire dessus.

En d’autres termes, le borgne proposait de transformer un hit and run en véritable assaut... Derrière Hart et lui, deux cents mercenaires qui en avaient marre de subir...

Romy Scharner

Les quinze hommes de Jaune 22 s’étaient mis en ligne assez espacée derrière des accident de terrain. Les échanges de tir avaient déjà débutés. Les trente hommes en face avaient du solide expérience car aucun ne semblait prêt à battre en retraite. Eperon 2 venait de faire un passage, les huit chasseurs avaient fait pleuvoir la mort sur les trente défenseurs de la ville à l’aide de leurs canons mais rien n’y faisait, leur puissance de feu avait à peine diminuée et cela les empêchait juste de passer à l’assaut. Romy et ses canons lourds étaient donc sollicités. Une seule passe et puis retour au Circé pour récupérer une nouvelle centaine de soldats, après quoi Eperon 1 reprendrait avec des bombes, des vraies, histoire d’infliger de vrais dégâts.

La communication se coupe. Des embouteillages... Tu parles... T'as demandé à Cap'tain Morgan si tu pouvais lui rendre service, avoue... Bon, j'ai d'autres chats à fouetter moi. Les Gomenzo avaient décidé de passer aux choses sérieuses, et ça ne sent pas bon pour nous. Avec des balles qui me sifflent autour des oreilles, difficiles de réfléchir. Trop loin pour que le SGC emploie ses grenades. Trop bien protégé pour viser sans se faire dézinguer aussi sec. Rester à couvert...

C'est quoi ces... Les mouches cuirassées qui partent à l'assaut maintenant. Inch'Allah, les mecs. Promis, le cercueil collectif sera en chêne, pas en sapin. Voyons le bon coté des choses : ils tirent moins. Et même plus du tout. Ils doivent être occupés à tailler le bout de gras. Au sens propre. Un regard par dessus notre abri de fortune. Ouaipe, c'est le cas.

V'là le Borgne qui me cause. Il n'a pas tort. Mais pas pour la même raison... Bon. Standing à respecter non ? Je me lève, configure mon communicateur sur la fréquence générale. Comment qu'il s'appelle le chef de l'escouade ? Boh, aucune importance.

Hart : On va laisser les nantis s'faire toute la prime, les gars ?! Ou on décide de se tirer les doigts du cul et de réclamer notre part comme des grands ?!

Vu le beuglement que je viens de pousser, y'a des audioprothésistes qui vont faire des affaires aujourd'hui... Pas de réponse attendue... D'un bond, je passe derrière la barricade. Pitié, faites que ceux d'en face continuent d'être occupé pendant qu'on court vers eux...

En survolant la zone d'attaque, Romy remarqua un détail troublant: malgré les assauts, l'ennemi restait fortement dissuasif, et leur équipement ne fablissait pas. La pilote fronça les sourcils, et refit un tour le temps de charger ses artilleurs.
Qu'est-ce que vous croyez, mes agneaux ? Je ne vais pas vous laisser zigouiller notre troupe avec votre minable petite armée! Et puis quoi encore...
La prussienne, avec un sang-froid remarquable, fonça en piqué juste au-dessus de la troupe à abattre, et appuya simultanément sur le bouton de décharge. Une déflagration pétaradante illumina le terrain, traînée lumineuse et sanguinolente sur le passage du vaisseau.
Et d'une.
Ignorant les consignes, elle se prépara à passer une seconde fois, histoire de donner un peu de temps à la cavalerie - qui pointait, au loin, le bout de son nez, elle les voyait sur ses radars. Bon. Quitte à se faire engueuler...
Second passage à toute blinde du J-ship, seconde rafale de tirs musclés. Romy avait utilisé une partie de carburant préalablement économisée pour filer plus vite hors de portée de tir - on ne sait jamais - , et regagna une altitude confortable pour ralentir la cadence. S'agirait pas de tomber en panne en plein milieu de l'espace, ça ferait mauvais genre.
Petit coup d'oeil en arrière. La zone semblait un peu plus éclaircie, Jaune 22 pouvait continuer son boulot en attendant les autres chasseurs lourdement équipés. Romy relança le canal radio commun, histoire de suivre la situation du hangar, tout en filant vers Circé pour le 3e embarquement. Ensuite, ce serait le véritable début de la fête...

Les crachotis et bruits de bagarre emplissaient la cabine de la pilote qui demeurait concentrée sur sa destination, tout en écoutant attentivement le déroulement des combats au sol. Hart et le Borgne devaient s'en donner à coeur joie, et les deux nigauds aussi, les connaissant. Ben tiens, qu'est-ce que je disais. Le beuglement de Tomas venait de lui vriller les tympans, mais quel gros....Pff. Elle entendait presque déjà ce satané capitaine persifler après la fin de la mission qu'elle était restée "bien à l'abri dans son cockpit douillet pendant qu'il se faisait tirer dessus"... Evidemment, ce n'était pa lui qui risquait de se faire exploser - atomiser - à tout moment par une roquette indétectable, hein... M'enfin, chacun son boulot.
Le vaisseau se positionna en douceur devant les soutes du Circé, et entra pour recueillir sa cargaison qui piétinait déjà. Bon, ceux-là étaient impatients de participer aux festivités, ça irait vite. Romy ouvrit son sas, et lança pour la forme un bref appel.
"Allons-y mesdemoiselles, les autres en sont déjà au plat de résistance!"
Histoire de les appâter un peu.

Tomas Hart.

La ruée inattendue du gros de la troupe surprit tout le monde, Antoneçu compris et rajouta à la cohue générale. Le lieutenant servile para un coup de baïonnette avec sa hache et, désarmant l’impudent, fit exploser son casque d’un coup bien placé, un second lui fendit le crâne. L’arrivée de Hart du reste provoqua un certain choc psychologique sur plusieurs cadres fidèles aux Gomenzo. Une retraite partielle fut ordonnée, piégeant ceux qui n’avaient pas été en mesure de saisir l’instant. Ils livrèrent une lutte acharnée, prirent leur quota de vie, et disparurent en une dizaine de minutes particulièrement intenses. Galvanisés par la réussite, une vingtaine de mercenaires appartenant aux anciens défenseurs de barricade foncèrent vers la ville. La fusillade qui les accueillit les laissa sans voix.

Antoneçu ordonna que l’on retourne les barricades mobiles intactes et que l’on se prépare à l’attaque. La phase suivante aurait lieu lorsque les nouveaux renforts arriveront. Il cherchait aussi celui qui avait pris l'initiative de lancer tout le monde...

À l’entrée du Hangar les techs s’activaient et effectuaient les derniers tests d’étanchéité, le grand sas de secours était en train d’être fixé. Une minute plus tard, ordre fut donné d’injecter de l’air à nouveau.

Romy Scharner.

Si la première passe désorganisa considérablement la force de diversion des gomenzo, la seconde eut un effet plus dévastateur, emportant quatre combattants. Jaune 22 mit immédiatement la pression puis passa à l’attaque, lorsque huit autres périrent suite au passage d’Eperon 1. Sur le retour, Romy croisa la baleinière qui emportait du matériel lourd tandis que sur le pont du Circé, l’on trépignait d’impatience et une quinzaine de techs attendaient que l’un des astronefs parte afin que le Yawl puisse se poser et donc les emporter eux aussi. Le ST 100 de transport terminait l’embarquement de ses troupes qui emportaient elles aussi un matériel assez conséquent. Le groupe à charge de Romy était aussi bien équipé bien qu’il ne convoyait pas de pièces d’artillerie comme les autres. Il s’agissait des groupes d’abordage du forceur de blocus et d’une partie de ceux qui s’étaient emparés de la goélette de classe Hontor. Le Capitaine Morgan, qui embarqua à bord du J Ship, ne dit rien sur le retard. Apparemment il n’avait rien à reprocher à une seconde passe de la part de Romy.

-Dépêchons, se contenta-t-il de dire. Ils doivent être en train de se réorganiser en bas.

Quel bordel. Mais quel bordel ! Le genre de foutu bordel qui me rappelait ma jeunesse, lorsque je rêvais encore de trucider de beaux officiers pédants en séduisant leurs belles... Bon, évidemment, j'avais vite remarqué que l'officier bien habillé, c'était en fait un mec au moins aussi amoché que toi qui avait sans doute les mêmes fantasmes idiots. Pour oublier tes rêves absurdes, y'a pas mieux.

Coup de bol, ça a marché. C'est un tel boxon, donc, que les Gomenzos n'ont pas tiré un seul coup de feu avant qu'on atteigne leurs barricades. Et les gars derrière ont suivi. Alors là, début de la curée.

D'un bond, je m'accroche -encore de beaux restes, le papi- en haut de l'une d'elle, que j'escalade sans aucun mal. On va passer la description de l'acte, ça va me rappeler mon premier coup... Nostalgie quand tu nous tiens. Une fois arrivé en haut, et devant la surprise générale en face -en cela que TOUT LE MONDE, amis compris, sont surpris-, on dégaine le couteau -qui tient plus de l'épée courte- et on saute -au sens propre- dans le tas.

Arrivée en fanfare avec mafieux dans le rôle du trampoline qui ne fait pas rebondir. Jambe lancée en avant, droit dans les valseuses de son pote. Remontée de genou, craquement au niveau du nez. On attrape son col alors qu'il part en arrière, et on le tire sur soi, droit sur la lame offerte vers la gorge. Jet rouge carmin, soudaine envie de pinard. Puis on retire et on passe au suivant. L'autre n'a pas eu le temps de se relever, d'autres SGC se sont occupés.

Les chocs continuent. Je ne vais pas me casser le cul à tout décrire, juste les impondérables. Du genre le golmon qui se bat contre un SGC. Suffit de lui rappeler qu'on me tourne pas le dos. Il n'oubliera plus ce qu'il ne pourra plus faire. Un autre qui me charge à la baïonnette. Dans un espace restreint, et dans une mêlée ? Alors que j'ai une arme plus courte ? Le con. Un pas de coté, main sur son arme, je le tire vers moi. Puis je prends dans mes bras mon nouvel ami, enserrant celui tenant le poignet autour de son cou. Non sans un joli mouvement de rotation. Puis on ramène le bras. C'est dingue ce que ces mecs sortent à gorge découverte. Ca caille pourtant !

On va s'arrêter là, sinon je vais devoir parler des quelques estafilades qui se rajoutent à ma collec'... Je les aurais toutes, un jour ! Alors que tout se calme, j'aperçois quelques gars qui courent après les fuyards... Bordel... Les c... Non... Et voila, a pas loupé... Quelques parts en plus. Ca c'est la bonne nouvelle. La mauvaise, c'est que si on sait que c'est moi qui ai lancé ce boxon, je vais me faire tirer dans les pattes... Je le sens gros comme un officier unionien.

La réflexion du capitaine laissa Romy de marbre. Rien ne l'intéressait à part la situation de ses camarades, en bas; des crachotis provenaient de la ligne de Hart, et malgré elle la prussienne s'inquiétait.
Bon, d'accord, elle s'inquiétait tout le temps pour ce crétin qui se prenait pour un tank à lui tout seul. Il avait tendance à entraîner les autres dans des charniers particulièrement sanglants, sans tenir compte du fait qu'ils n'avaient pas forcément envie de finir aussi couturés que lui - ou de finir tout court.
Le J-Ship redécolla lentement, et fila à vitesse modérée vers le hangar. Inutile de courir, d'autant que les économies de combustibles étaient de mise. Au-dessous, des bruits de bataille indiquaient que la partie n'était pas encore gagnée; Romy serra les dents, et se concentra sur ses écrans. Au moins, les soldats ennemis avaient pris un sérieux coup dans l'aile, lors de son second passage, et aucune remontrance n'avait vrillé l'appareil de communication. Bon.
Hangar en vue. Quelques éclairs lumineux, des mouvements humains... Pas encore fini, tout ça.
Elle déchargea son dernier convoi, et resta un instant devant la porte béante, hésitant à descendre elle aussi. Puis, secouant la tête, elle remit les gaz, et repartit vers là où elle était attendue.
Bon Dieu, Hart, pas de conneries.

Quoi, moi ? Pourquoi est-ce qu'il ... Merde, ma voix ! Il a du reconnaitre ma voix dans le transmetteur ! Je le savais ! Saloperie, promis, j'arrête de cloper à la fin de ça !

Calmos, mec... Manifestement, c'est pas ça qu'il te veut... Il veut... Hey ! Il veut que tu joues la chair à canon ?! Raaaah ! Bon. Rien à faire, opine du chef, pousse un gros soupir, et répond de ta grosse voix rauque bien reconnaissable...

Hart : "Compris... On va donc jouer aux cibles humaines avec quelques gars. Les tarlouzes, là-bas !"

Un groupe d'hommes lève la tête, une vingtaine de gars, tandis que je me dirige vers eux. J'ai pas sélectionné un petit groupe pour rien.

Hart : "Prenez tout ce qui peut faire du bruit, de la fumée, grenarde flash, fumigène, ce que vous voulez, jouez aux pétomanes si ça vous branche, ou vous crierez comme des femmes, même si je dois broyer les deux noix qui se tiennent entre vos jambes. Je veux que vous puissiez faire autant de bruit qu'une partouze de fillettes Gomenzos dans cinq minutes. Fini la sieste. Raus !"

Les hommes se séparent. Bon, au moins, ils sont actifs. Je me retourne vers ce connard de gradé guest-star.

Hart : "A vous la plus grande partie des gars. On va juste faire diversion. Attendez cinq minutes avant de prendre d'assaut l'endroit, et la plupart de leurs hommes vous tourneront le dos. Et quand vous arriverez, ils se croiront pris entre deux feux. Mais ne nous laissez pas rôtir, j'ai envie de profiter de ma prime..."

Quoi ? C'est la vérité vraie, ma bonne dame ! Je veux profiter de ma retraite ! Nan, ça, je déconne...

"Je peux faire n'importe quoi de ce vaisseau, y compris un looping autour du tien, mon pote. Allez, pousse-toi, j'ai des choses à faire."

La réponse de Romy claqua comme un fouet; elle n'avait pas de temps à perdre en discussions futiles, les techs embarquaient déjà le matériel en soute. D'un coup d'oeil, elle vérifia que tout était chargé, puis elle ferma tout et prit de la hauteur. La situation ne paraissait pas aussi bien contrôlée qu'elle l'aurait dû, trop de pertes à son goût de leur côté... Et pas de nouvelles de la baston au sol.
Bon.
Le J-Ship fusa vers Jaune 22, survola la zone d'intérêt en rond, histoire que la pilote se fasse une idée de la suite. Décrochant sa radio, elle lança:

"Jaune 22, ici Eperon 3. Besoin de matériel ou de soutien ? A vous."

Autant se rendre utile. L'inaction serait la pire des choses.
Bon sang, Hart! Les gars! Donnez signe de vie! Romy pesta intérieurement. Elle n'aurait jamais du donner son accord pour ce raid, c'était complètement démesuré, mal assuré, kamikaze. Mais le capitaine avait insisté sur le magot en jeu, et comme toujours, l'attrait de l'argent avait eu raison des dernières réticences de Romy qui maudissait à présent leur cupidité.
Bon, essayons de faire en sorte que les choses tournent à notre avantage.
Elle continua à tourner en rond, attendant la réponse de Jaune 22 pour ensuite se diriger dans l'espace.

Inutile de décrire le boxon que ça a fait. Comme quoi, vingt hommes, ça peut gueuler. Et le pire, c'est que ça marche. A la fin, des vingt, il n'y en a plus qu'une.... Douzaine à vue de nez debout... Mais au moins ça marche... Un regard sur mon bras, où coule un léger filet de sang. Doué comme je suis, j'ai pu me faire ça tout seul, saloperie. Pas de quoi y faire attention.

Le plus gênant, ça restait le fait qu'ils continuaient de tirer... L'assaut des gars en face n'avait pas du fonctionner comme prévu, je savais qu'on pouvait pas faire confiance à Antoneçu. Le feu avait molli, mais j'aurai aimé qu'il stoppe ! Je jette un regard à mon vieux "camarade", qui se contente de hocher la tête. Bordel, pourquoi ne suis-je pas le seul irresponsable ici ? Sur une onde courte, uniquement destinée à mes "camarades", dieu que ce mot est affreux. Je prends dans ma patte tous les explosifs qui peuvent me trainer sous la main.

Hart : "On nous couvre, mesdames ! Donnez moi une occasion de compter mes abattis !"

Bon, qu'est ce qu'ils avaient pris avec eux... Du flash, du fumigène, mais aussi du frag, et quelques... Mines ? Pas plus mal. Je fouille sur moi et sort tout ce qui me reste... De quoi faire un sacré bordel... Un geste de la main à mon compagnon d'infortune qui va regretter que je prenne une décision, et c'est plaqué au sol, planqué par la fumée et le chaos que j'avance... Les balles et l'énergie compacte me passe entre les deux oreilles... Enfin un peu plus haut, sinon, ma cafetière commencerait déjà à fuir, suis pas en tungstène... A quelques mètres de nos rangs, sur la longueur, nous commençons alors à installer tout ce qu'on peut au sol : mines, grenades, explosifs, tout pour un feu d'artifice, réduit, nous ne somme que deux pour porter, mais un beau feu d'Hartifice. Ils semblent ne pas nous avoir repéré. En même temps, même avec ma lame, je ne pourrai pas couper la fumée qui passe au dessus de nous. Alors je prie encore pour ne pas perdre une balle. Ou plutôt, qu'une balle ne se perde pas dans mon corps délicat et... Mais qu'est ce que je raconte, moi ?

Même pas un demi-tour, je rampe à reculons une fois mon job fini. Une étincelle près de mon oeil... Moman, j'ai failli devenir comme le borgne... Une fois revenu plus où moins à couvert, et toujours sur fréquence courte.

Hart : "Grincheux, Simplet et Timide, reculez. Les autres, faites mollir le feu. On fuit. Enfin, ça c'est ce qu'ils doivent croire. Reprenez le tir à mon ordre."

Je suis fou, et j'adore ça.