Pour l'instant, tout va bien

L’Opéra de Solaris, dont la coupole s’élevait à la surface, étudié dans ses moindre recoin pour une acoustique parfaite était pleins. Salle comble et fin des ventes en moins d’une heure. Le philarmonique de Kryptonn y jouait divers morceaux plus connus les uns que les autres de l’Europe d’une autre ère. Elea était bien placée, quasiment dans l’axe de la ce mouvement était miraculeux et tous les sens étaient en éveil. Les fresques jouées par quelques acteurs fort connus des initiés n’apportaient que plus de vitalité à des soubresauts auditif déjà limite orgasmique. Qu’est ce qu’on comprenait que l’Eglise eut voulu les interdire.

Elea pressa la main de sa voisine, ces vibrations… Ces vibrations..... Puis elle se ravisa, et desserra son étreinte, peinée. Elle replongea dans l’horreur qui la tenaillait si souvent, et repensa à sa journée du lendemain, pour oublier ce vice qui la hantait. Elle allait devant quelques représentants de l’Orion démontrer ses projets, la classe de patrouilleurs lourds qu’elle proposait. Une responsabilité écrasante, même si on pouvait se permettre de perdre un appel d’offre. Puis soudain, le crescendo fut transcendant, on pouvait voir sans forcer son imagination, des dizaines de vaisseaux, se croisant, se mutilant, déchargeant la mort et la recevant. Des hommes tenir la barre, face à un nuage de feu, de flamme et de fin qui léchait la coque jusqu’à faire d’eux un ensemble de chaleur et de lumière. De la bravoure et du courage. C’est ce qu’inspirait profondément cet air. De la bravoure et du courage, et Eléa serra cette main aimée. En caressa, l’avant bras, puis remonta ce geste de tendresse jusqu’à l’épaule, effleurant du dos de ses doigts fins le cou de sa voisine étonnée…



Ô rêve, un sourire en tant que réponse, elle m’aime donc aussi… Athènes, ma sœur… Nous n’avons jamais dans la famille appris à nous montrer les sentiments, je suis tellement heureuse de t’avoir retrouvé. Non, c’est trop. C’est définitivement trop. Ce je t’aime était stupide. Le spectacle se termine, à défaut d’ardeur, nous n’aurons pas d’art, autant quitter la pièce daredare.

Le lendemain

Dans l’infini dénué de matière flottait un vaisseau, il ressemblait de loin à un Thurini, mais s’approchant on pouvait considérer une énorme différence d’échelle… Et de grâce, ce doux vaisseau qu’Elea ne reconnut pas était son appréhension la plus immense. Elle y passerait son premier entretien en tant que chef de projet de la CSO. Invitée à entrer dans la salle, elle passa le seuil qui l’en séparait…..

L’appréhension guettait, et ce n’était pas ce visage sévère qui y mettrait rapidement terme. Eléa, petite souris entra puis s’assit. Elle savait qu’il était de coutume de présenter le projet par le Jury, pendant quelques minutes, pour citer les tenants et aboutissant de telle volonté, blablabla. Cela ne dura finalement que quelques secondes.


- Nous vous rappelons que vous êtes ici pour présenter au jury ici présent, la nouvelle gamme de vaisseaux que vous souhaitez développer pour Solaria, que ceux-ci devront avant tout être destinés à nos forces, suivre la philosophie que nous imposons à nos forces, mais qu’ils pourront être downgradés afin de devenir exportables, confirmez-vous que le projet que vous présentez réponds en tous points aux éléments cités.


Elea suivant la tradition, se leva, se tint le plus droite possible, regarda ses interlocuteurs droit dans les yeux, et déclama sans respirer; tremblotante dans son tailleur beige :

- Je certifie que toutes mes recherches ont remplis ces critères.


Puis pour elle commença l’épreuve. Son premier rôle, celui qu’on lui avait donné était de faire un audit sur l’actuelle capacité de la flotte, et les évolutions possible tant que probables que pourraient réclamer les officiels de l’Armée. On confiait généralement cette tâche à des docteurs en stratégie, mais petit problème, l’actuel titulaire du poste était à l’autre bout de la galaxie… Et ces plans s’établissant sur plusieurs années, on admit qu’on pouvait tester cette extrêmement intéressante recrue, récupérée à prix d’or, et de vive lutte. Au pire, on saurait à quoi s’en tenir, et ses travaux étaient purement analytiques. Elle prit sa respiration, pensa à sa fratrie, et se lança dans l’espace qui la séparait encore de sa carrière…




- Après avoir analysé la composition militaire de la flotte de guerre, j’en suis arrivé à l’estimation suivante. Les appareils de l’Hirosabat ne sont pas remplaçables actuellement, sauf à grand renfort de budget, par des appareils de qualité très supérieure. Ceci excluant le chasseur, que nous pourrons remplacer assez facilement, j’y reviens plus tard.
Concernant nos vaisseaux, je pense qu’une modernisation du CSO-103, croiseur intermédiaire de la flotte est souhaitable. Ainsi qu’une déclinaison plus lourde. Mais j’y reviendrai aussi.
Concernant le Longsword CSO-1167, une modernisation à mi vie semble intéressante, mais pas plus de travail. Revenons donc au cas d’un potentiel nouveau chasseur en premier lieu.



Les dés comme le sors étaient jetés, et Elea ne sentait plus d’appréhension, elle n’était pas dans son premier élément, qui était la conception dure, mais elle prenait plaisir à développer des concepts qu’elle connaissait et maîtrisait totalement. Nettement moins artistes que les commerciaux nés, elle n’en restait pas moins sure de son fait. Lançant son slidepack, l’on put voir apparaître le Sunflare, actuel chasseur de Solaria, en cours de remplacement.


- Comme vous le reconnaissez, voila le Sunflare, seul chasseur de la Force aérienne, en cours de remplacement… Par un torpilleur. Cet appareil n’a aucune qualité, enfin si, sa vitesse ascensionnelle, dont nous n’avons plus que faire maintenant que nous avons récupéré la maîtrise spatiale. Bref, nous manquons aussi d’intercepteurs purs pour escorter nos vaisseaux plus lourds, le Sunflare n’en étant pas vraiment capable. J’appelle aussi à un remplacement de cet appareil, que nous pourrions développer, une cellule simple dont la première spécificité serait d’être totalement dronisée. Pas besoin de perdre de temps à développer une formation spéciale spatiale, nous n’en avons ni le temps ni l’utilité, alors que nous sommes largement capable de concevoir un système de pilotage indépendant. Nous possédons d’ailleurs à ce sujet des rapports publics émanant d’Aunadar ou d’Erikea, qui émettent des hypothèses quant aux principaux problèmes rencontrables et la philosophie adoptée pour y répondre.

Faisant glisser, au fil de ses mots les diapositives, elle expliquait les fondements de la stratégie aérienne purement défensive des intercepteurs, contrairement aux divers rôles potentiels d’un torpilleur, et de la complémentarité entre les deux engins. Il serait même imaginable à vraie dire, que le torpilleur dirige plus ou moins ces dits drones de combats, dont la taille devrait être minimale, de même que le prix de production.



- Maintenant, pour les vaisseaux plus lourds, à commencer par le CSO-103, une étude approfondie pourrait être clef. C’est là qu’Hirosabat tentera de nous cueillir. Le 103 est un bel appareil, capable et utile. Par contre, c’est un piètre chef de flotille, et un piètre escorteur. Il est bien utilisé en paire ou en escadre de CSO-103, dans un rôle de guerre de course, ou de guérilla spatiale, d’usure de l’adversaire, c’est vrai. Mais dans une flotte plus large, cherchant à gagner un affrontement frontal il est plus un poids qu’autre chose. Et nous savons que si notre planète mère était attaquée, l’épine dorsale de la flotte du dernier rempart serait constituée d’appareils non fait pour ce rôle. Je propose donc une modernisation de mise au goût du jour du 103, dans son rôle de Lévrier spatial, mais aussi une version alourdie et musclée.



Une diapositive apparu elle représentait un CSO-103, qui à travers diverses modifications rapidement démontrée grossissait à vue d’œil, ses spécificités changeant simultanément.



- Un commercial vous expliquerait ça mieux que moi, mais Hirosabat partira d’une feuille blanche pour proposer un intermédiaire entre la cuirasse et la cote de maille, ils auront donc un avantage dans la liberté de mouvement, nous pouvons le contrer en proposant un prix bas. Comment ? En dérivant, du CSO-103 cet appareil qui manque à la flotte, pour en escorter les vaisseaux lourd, et constituer une vraie épine dorsale. De fait, de nombreuses choses seraient nouvelles ou modifiées, mais nous n’aurions que des frais d’études limités.
L’avant-projet consisterait à rajouter deux tronçons, l’un à hauteur des propulseurs principaux – qui changeraient pour devenir moins rapides mais plus endurant – un autre en arrière de la passerelle, qui permettrait d’agrandir les soutes, et de mieux répartir les capteurs. Ce qui nous permettrait de mieux blinder les œuvres vives. L’armement et l’architecture système globale, restant les mêmes. Il faudrait pour finir installer des tourelles très capables pour la défense antiaérienne / antimissile que nous devons être capables d’acheter sur Solaria, ou de produire sous licence.





Relativement fière d’une présentation enfin terminée, elle attendait les questions, pour embrayer et mieux développer les concepts, notamment l’intérêt d’un appareil intermédiaire, apte tant à transporter du fret sur de longues courses, qu’à servir d’escorte rapprochée contre tout le panel d’arme pouvant être employées contre un vaisseau de la classe lourde de Solaria. Elle était globalement fière de son analyse, et ne pensait pas que celle-ci ne serait remise en question.

Elea, enchantée de déléguer ce travail à ceux qui en étaient les spécialistes, ne put tout de même pas se faire au spectacle auquel elle assistait. Une partie d’Arena. Elle n’avait jamais trop apprécié ça. Sport bête et primaire, on bat bien plus son adversaire quand on le toise que quand on le saigne. Enfin, la culture est d’une statique dynamique, si bien qu’on est toujours persuadé qu’elle évolue, mais que quand on la définit, on la traite comme constate et ne connaissant pas le progrès, pardon, le changement. Discrètement elle put recevoir et envoyer quelques messages à son chef de projet, un garçon splendide. Oui, un garçon. Elle ne se comprenait plus. Apte à lire la stratégie commerciale d’une entreprise nationale, elle n’était pas capable de savoir si elle préférait les jeunes hommes, ou les filles d’Eve.



Cependant, son travail de conceptrice, ne quittait pas son esprit, pas une seconde. On lui avait parlé des tentatives Seraniennes, voir Unionienne de s’accaparer les faveurs Solariennes, elle ne savait pas vraiment comment, mais elle sentait qu’il y avait potentielle affaire à faire, elle n’avait cependant pas trouvé, ni même donc saisit l’opportunité.
Elle se demandait probablement encore si elle devait se mêler de l’ingénierie de propulsion du CSO, quand la « mise à mort » fut prononcée. Un combattant gagna, il était probablement connu vu qu’on scandait son nom. Ceci n’était pas pour émouvoir Eléa, et déjà se préparait elle à écrire les quelques lignes de son rapport quotidien sur l’avancement du projet, on dessinait les premières maquettes numériques, et on les exposait aux pires tests possible, aussi horribles qu’ils étaient virtuels. On s’amusait souvent de ce paradoxe, et on exposait les vaisseaux à des problèmes qu’ils n’auraient jamais. Le but n’était pas d’y survivre, mais de voir combien de temps l’intégrité humaine était préservée. Dans un élan de gaspillage on décida même de créer l’orbite proche d’une étoile, orbite proche ? Non. Très proche, cent mètres. Evidemment, même les hypothèses, les supputations, que dis je, les pensées les plus absurdes et les plus solides n’y survécurent pas bien longtemps. Mais c’est de cette façon qu’on se rendit compte que la meilleure parade était la canalisation, et c’est dans cet insensé gaspillage que les Solariens découvrirent comment s’approcher plus près des étoiles que les autres.

Comme on le lui demandait, à elle comme aux autres ingénieurs de rang un, le potentiel qu’elle trouvait à une construction d’appareils plus lourds, elle répondit de façon légèrement exagérée, que c’était une idée brillante, mais à préciser cependant, notamment par la fin de ces appareils. Seraient-ils militaires ou civils, quels seraient les partenaires étrangers ? Ni l’UTE, ni Seranon, c’était souhaitable, car cela faisait courir le risque, à Solaria comme à ses entreprises d’être gobées, avalées, sans être même mâchées ne serait-ce qu’une seconde. Elle se demanda après coup pourquoi avoir fait ces précisions, mais il lui semblait qu’elles étaient adaptées à la situation, alors elle évita de le regretter trop, et puis, le match touchait à sa fin, elle put donc se retirer, et même se coucher. C’est regrettable d’en être réduit à travailler, alors que théoriquement on est à un endroit précis pour se distraire, mais bon, telle était la vie d’un cadre supérieur sur Solaria, et ailleurs aussi d’ailleurs, on ne pouvait rien attendre de moins quand on souhaitait un salaire important.